Agnès Boucher - Auteur de Méfiez-vous des contrefaçons, de Comment exister aux côtés d'un génie et de Alma Mahler
Quelques questions sur vous et l’écriture
- Parlez-nous de votre dernier ouvrage.
Celui vient de paraître ou celui qui va paraître ? Je plaisante. Méfiez-vous des contrefaçons est un polar, que j’ai voulu à la fois respectueux du genre et différent. J’ai cherché à donner davantage de place aux femmes, j’en ai donc créé quatre, chacune avec sa personnalité. Mais il y a aussi des hommes. La famille aussi y a une grande place, pas dans ce qu’elle a de plus « aimable ». La psychologie des personnages est primordiale pour moi, presque davantage que les situations. Pour moi le polar est prétexte à analyser les comportements et les psychismes. Le polar où ça canarde de partout m’ennuie. D’où mon goût pour les livres de John Harvey, Henning Mankell, Fred Vargas…
- Depuis quand écrivez-vous ?
Toujours ? J Depuis l’adolescence, c’est clair. Des choses très très nulles au départ. Je pensais que pour écrire, il fallait nécessairement être malheureuse. Il faut surtout beaucoup de travail, de recherche, d’écriture, de réécriture, de relecture, bref, on n’en sort jamais SAUF quand le livre est enfin publié. Là, c’est trop tard pour y revenir et on peut passer à un autre ouvrage, qu’on essaie de rendre meilleur que le précédent.
- Que vous apporte l’écriture ?
Au début, c’était pour vivre des vies que je ne pouvais pas vivre, permettre à mon imaginaire de s’exprimer. Aujourd’hui, je ne sais pas, c’est tellement naturel, inscrit en moi. J’ai connu une très longue période sans écriture. J’en ai profité pour vivre, et maintenant, je fais les deux à la fois.
- Dans quelle condition écrivez-vous ?
Il faut que je sois seule. Il me faut du calme, de la musique, pourquoi pas, classique toujours. Il faut que j’aie du temps. En revanche, les notes, c’est partout, parce que l’inspiration ne prévient pas et que je me méfie de mon inconscient qui est très doué pour m’envoyer des idées supers et de me les reprendre aussi sec.
- Quelle est votre source d’inspiration ?
Tout. La vie, les autres, les histoires des autres, les comportements autour de moi. Il suffit d’une attitude, d’une réplique dans un café, et l’imaginaire brode. Ce n’est pas bon du premier coup. Avoir travaillé sur l’inconscient aide évidemment à lâcher prise et à voir des choses que les autres ne voient pas.
- Etes-vous écrivain à part entière ou exercez-vous une profession à coté ? si oui laquelle ? Que vous apporte-t-elle par rapport à votre travail d’écrivain ?
Hélas, je ne gagne pas encore ma vie avec l’écriture. Je suis « coach », j’accompagne des salariés ou des « chercheurs d’emploi » dans leur reconversion professionnelle. Les gens sont étonnants. Certains sont capables de faire des virages à 360°. D’autres au contraire ne parviennent pas à se donner les moyens de vivre leur vie, préfèrent conserver leurs entraves sociales, familiales et professionnelles. Tous ces parcours m’inspirent, sans que je les trahisse jamais, comme une forme d’éthique à ne pas utiliser la matière que mes « coachés » me confient, sans la modifier, la retravailler, au point qu’elle leur devient méconnaissable.
- Avez-vous d’autres projets d’écriture ?
Oui. Avec les Editions Hélène Jacob, je sors un recueil de nouvelles en février je crois, ou en mars, j’ai un trou. Enfin, début 2015. Et je suis en train d’écrire un nouveau polar, écrit à la première personne. Si ça marche, ce sera pour 2016. En fait, j’aime varier les styles. Avant Méfiez-vous des contrefaçons, j’ai écrit un essai, et un récit, chez un autre éditeur. Tester de nouvelles manières de faire m’intéresse. Je n’ai pas envie d’écrire toujours le même livre. J’ai peut-être tort, je ne serai jamais nobélisée… ;-)
Quelques questions sur vous et la lecture
- Qui vous a fait aimer la lecture/ l’écriture ?
La lecture est dans la culture familiale. À la maison, tout le monde lisait. J’ai du être davantage intoxiquée que le reste de la fratrie… Quand je lisais un livre, je brodais toujours autour de nouvelles péripéties. Ca m’a donné envie d’en écrire qui soient vraiment miennes.
- Quel est votre auteur préféré en dehors de vous-même bien sûr ! ?
Il y en a trop pour que je les cite. Paradoxalement, j’adore les auteurs de théâtre : Tchékhov, Shakespeare, Racine aussi, sa langue est tellement merveilleuse. Je suis très littérature classique.
- Quel type de lecteur êtes-vous ?
J’ai longtemps été gloutonne, lisant les livres à toute vitesse. J’allais en acheter des piles à la Fnac ou chez mon libraire. Je me suis calmée. Je n’ai plus le temps. Et puis, je deviens plus exigeante et les auteurs germanopratins, comme je les appelle, m’ennuient souvent à se regarder le nombril.
Quelques questions sur les blogs et tout le reste …
- Que pensez-vous des blogs littéraires ?
Je les connais encore mal. Je suis abonnée à certains, mais quand il y a trop de critiques, je suis un peu perdue. À moins de me faire plus sélective sans doute. En revanche, ils sont un vrai bol d’air pur en comparaison des critiques journalistiques officiels qui nous parlent toujours des mêmes livres. On sent trop de copinage chez eux, alors que les blogueurs et blogueuses sont « a priori » indépendants.
- Que pensez-vous de mon blog en particulier et quel est pour vous l’intérêt de répondre à ce petit questionnaire ?
On y trouve des pépites mais je reconnais être un peu perdue dans les catégories… Ca ressemble à une grande malle pleine de choses incroyables, mais comment faire pour les retrouver. Alors je vais, je viens, je prends, je lis… je m’y perds un poil, je le reconnais… J
- Comment gérez-vous les critiques des lecteurs de blogs qui ne sont pas des spécialistes ? (critique positive et négative) ?
Je prends tout. Je n’ai jamais été vraiment sensible à la critique. Je sais, ça choque souvent, mais c’est comme pour moi. On me prend comme je suis, sinon, tant pis. J’ai passé l’âge de perdre du temps à plaire à tout le monde. Si la critique est bonne, je trouve ça bien sûr gratifiant, essentiellement quand elle est argumentée. Si elle me permet d’avancer en relevant des erreurs, idem, je prends. Quelqu’un qui m’éreinte (pour le moment, coup de chance, cela n’a jamais été le cas), je me dis que si un éditeur a accepté mon texte, c’est qu’il n’est pas si nul que ça. Chacun ses goûts… Moi-même, je n’ai jamais pu lire Proust, ou si peu, alors… J
- Pensez-vous que les jeunes ne sont plus capables d’apprécier la lecture ? Quels remèdes proposeriez-vous ?
Je ne sais pas. Je crois en l’exemple que donne les parents et les adultes. Les professeurs, bien sûr. Il est également bon peut-être de parler avec eux des livres qu’ils lisent. Ceci dit, moi je n’en parlais jamais…
- Que pensez-vous du boom des éditions numériques ?
Je ne lis pas tout en numérique, mais le prix des livres est prohibitif, sans que le contenu soit nécessairement à la hauteur. Le problème est que les ebooks chez les « grands » éditeurs sont également très chers. Donc, je privilégie les ebooks à « prix normal », c’est à dire moins de 5 à 6 €, sinon, vive la bibliothèque ! De toute façon, il y a trop de livres chez moi, je n’ai plus de place pour les ranger.
- Quels conseils donneriez-vous aux jeunes écrivains ?
Travail, travail, travail, travail, travail…. ! Trop de textes sont mal écrits, mal présentés, bourrés de fautes d’orthographe et de grammaire. Persévérance dans l’effort ! Et puis racontez ce que l’on a soi-même vécu n’a pas toujours grand intérêt. Il faut aussi travailler son imaginaire. Je déteste les auteurs qui « pompent » leur vie et celle des autres, genre… Angot ? Mince ! J’ai cafté! J
La parole est à vous : Une dernière phrase ? pensée ? critique ?
J’aimerais vraiment que les libraires s’ouvrent aux petits éditeurs et cessent de nous faire avaler ce que les grosses maisons d’édition leur mettent sous le nez. Lors de la dernière période des prix, à la rentrée, je n’allais plus chez mon libraire tellement j’en avais assez de voir tous ces bouquins « évidents » étalés alors qu’il y a des trésors dans les rayons. Il faut mettre l’imagination au pouvoir. Et alors, on pourra vraiment contrer Amazon.